La jungle, sa faune et sa flore, son humidité, ses bruits, son absence de ciel et de perspective, ce sentiment étouffant. Autant de critères qui me laissent perplexe. Déjà en temps normal, je n’aime pas forcément me promener seule en forêt, sûrement des restes de quelques frayeurs étant gamine…
A San Augustin, sur le site archéologique principal, je n’ai rien vu venir. Après la visite du musée, on a pris un petit circuit qui descendait dans la forêt pour observer les différentes statues de pierre exposées, sur un sentier bien balisé. Au bout de quelques minutes je me suis sentie mal : vertiges, vision floue, perte de repère. Plus j’avançais sur le chemin, plus j’avais l’impression que mon esprit se dissociait de mon corps : je ne reconnaissais pas ma voix, je n’avais plus qu’une vision partielle, même mon bras semblait détaché de mon épaule. Mon intention n’était pas de faire un remake de l’aventure équatorienne vécue par Jéjé quinze ans avant, mais j’ai tout de même eu un moment de stress et d’incompréhension, cherchant du réconfort dans les yeux de mon homme et partageant le soutien de Noah en serrant sa petite main. Les effets se sont estompés sur le reste de la randonnée mais mon esprit cartésien a été mis à l’épreuve sans trouver d’explications factuelles.
Après 4 jours à San Augustin, notre aventure a pris la direction du sud, Mocoa et le début de la « vraie » Amazonie colombienne. Malgré ma première expérience douteuse, j’ai accepté cette destination pour visiter un centre de réhabilitation d’animaux sauvages (histoire de voir de plus près les ours, lynx, tapirs et oiseaux locaux) et réaliser une randonnée mythique, menant à la Cascade de la Fin du Monde.
C’est sous une chaleur étouffante et humide que nous arrivons à Mocoa. On a choisi un hostal à l’entrée du parc de la randonnée – format dortoir et demi-pension – pour démarrer directement la balade. Je commence ma journée avec un sentiment mitigé sur cette nouvelle immersion en pleine jungle : est-ce qu’il faut s’habiller de la tête au pied histoire de se protéger des bestioles ? Faut-il un guide pour ne pas se perdre ou un coupe-coupe pour tracer notre chemin ? Les esprits de la jungle vont-ils encore me jouer des tours ? Finalement, le site s’est considérablement ouvert au tourisme et c’est LA balade du dimanche que les colombiens affectionnent ; différents postes d’information sécurisent la randonnée et rappellent les consignes de respect de l’environnement.
La première partie de la rando traverse des hostals tenus par des « baba cool » : mode écotourisme, vente d’objets artisanaux et méditation sous flûte de pan. On monte ensuite des séries de marches sur un sentier aménagé et entretenu. On est au coeur de la forêt, du chant des oiseaux, des écoulements d’eaux sur les parois, de la végétation fleurie. Hormis le fait qu’on transpire beaucoup et que la chaleur nous étouffe un peu plus à chaque marche grimpée, aucun signe désagréable ne s’empare de moi, pas d’esprit maléfique, juste un paysage magnifique et serein. Au bout d’une heure trente de marche, de superbes cascades s’enchainent, l’eau y est claire et assez chaude pour que Jérôme s’y laisse glisser tel un pingouin sur la banquise ; de son côté Noah décide de faire son baptême de saut en plongeant à 3,5 mètres de haut. Vue du haut, la cascade de la Fin du Monde est en fait moins spectaculaire que prévue car pour l’admirer il faut enfiler un baudrier attaché à une prise fixe et ramper à plat ventre pour observer à la verticale ses eaux qui se jettent dans 80 mètres de vide. Cerise sur le gâteau, un drone vous prend en photo et vous recevez le souvenir en direct sur votre boîte mail. De ninguna manera, gracias !
Un avant-goût d’une expérience chamanique 😉 superbes photos !
J’adore, la description de tes sentiments ! Les photos sont magnifiques, pendant que vous vous baignez dans les cascades, nous on est sous la pluie !! Merci pour ce partage