La bande à Nono

Quand je me lève, j’ai faim. Je vais voir Maman et je lui dis que j’ai faim. Elle me dit de me recoucher, que le jour n’est pas levé. Alors j’attends que le jour se lève et je reviens lui dire qu’on peut maintenant prendre le petit déjeuner. Elle me répond que je n’ai pas le droit de me lever tous les matins avant 7 heures, et puis me conseille d’aller voir Papa. Parfois Papa, plus matinal, se lève et vient me raconter des histoires. Parfois il se met des bouchons dans les oreilles. Et là je fais le pied de grue. L’un des deux finira par craquer. FoniKonaï !

Au bout d’un certain temps tout le monde finit par se lever, installer la table pour le petit déjeuner, et je peux enfin attaquer ma gamelle : des céréales avec du lait froid. Pas de chocolat, je me récupèrerai de toute façon durant le reste de la journée. Quand j’ai fini ma gamelle, je parle à mon ventre et je lui demande si c’est assez : souvent il me répond « encore ». Après le rab, c’est maintenant le temps de la course de voitures. Elles sont cinq, souvent accidentées, parfois égarées dans un sac de couchage, sous un tas de feuilles ou un canapé. Elles roulent vite, mais respectent toujours la signalisation sur la feuille de papier dessinée par Maman – celle qui me sert carte routière . Ca fait dix fois que j’ai fait le tour de la carte. « Tu joues avec moi ? » je demande à chacun de mes parents. « On monte dans la carriole ? » ils me répondent en choeur.

Ca prend du temps, mais je finis par céder. Au moment de monter dans la carriole, on est nombreux. Il y a ma soeur et mon frère, je leur fais une place sur le siège d’à côté. Parfois ils ne sont pas là : ils voyagent en Slovénie et en Croatie. Je comprends que Papa ait de la peine à tirer la carriole avec autant de monde dedans.

Lorsque je sors de la carriole je me promène toujours avec mes deux petits poussins dans les poches. Un jaune et un vert. Ils dorment souvent. Quand ils sont éveillés, ils ont souvent faim, mais ne peuvent pas manger de pomme car ils n’ont pas de dent. Ils mangent de la soupe et des yaourts. Nature les yaourts. Ils n’aiment pas les yaourts au chocolat. Les yaourts au chocolat ils sont pour moi. Je vous ai dit que j’allais me récupérer sur le chocolat. Quand je les sors de ma poche mes petits poussins, ils jouent avec moi car c’est moi leur maman. Parfois ils s’échappent. Je suis obligé de courir à fond pour les rattraper. Et je les gronde. FoniKonaï !

Des fois il y a Gargamel qui arrive avec Azraël dans la carriole. Là je lui crie : « Vous n’arrivez rien à faire dans cette histoire, partez chez vous ! ». Alors ils repartent dans leur histoire, à la recherche des Schtroumphs. Heureusement les Schtroumphs ont trouvé la parade pour éviter les griffes du sorcier et son chat : ils ont inventé un train. Enfin surtout Schtroumph Bricoleur et Schtroumph à lunettes. Schtroumph à lunettes est d’ailleurs un peu embêtant : il parle toujours. J’aime bien jouer avec eux mais Schtroumph à lunettes me fatigue. Alors je les laisse dans leur histoire.

Du coup, je me retourne vers Maman et Papa, et je leur demande pourquoi : « Pourquoi il pleut ? » « Pourquoi l’orage fait du bruit ? » « Pourquoi les taxis sont des fois jaunes ou des fois gris ? » « Pourquoi on traverse au feu rouge ? » « Pourquoi je n’ai pas mon vélo ? » « Pourquoi on ne prend pas le déjeuner au restaurant ? »

Des fois ils me répondent, des fois ils me disent que la route grimpe et ils ne peuvent pas me répondre. Et quand la route descend, je leur demande de répondre, mais ils me disent qu’il y a trop de vent avec la vitesse et qu’ils n’entendent pas. FoniKonaï !

J’aime bien quand on s’arrête à la plage. Mes petits poussins aiment aussi, ils en profitent pour sauter dans l’eau. On essaie d’y voir des poissons, des faux et des vrais. Mes parents ont mis du temps à comprendre pourquoi il y a des faux poissons, c’est pourtant eux qui me l’avaient expliqué un jour en me montrant un pêcheur : il attachait un faux poisson au bout de sa canne à pêche pour en attraper des vrais.

Maman me montre aussi comment faire des châteaux dans le sable. On construit des murs, des tours, des petits ponts avec des morceaux en bois. Puis je décore le château avec des coquillages ou des galets de toutes les couleurs. Le plus dur est de partir, surtout quand les vagues essaient de rentrer dans mon château. Je resterai bien là des heures pour le défendre, et je fais la sourde oreille aux incantations de mes parents. Papa finit par m’exfiltrer de la plage et me transporte manu militari dans la carriole. Je crie. FoniKonaï !

Pour pallier à ma mémoire de 3 ans pas toujours opérationnelle, je garde des souvenirs de tout ça : je prends des photos avec l’index et le pouce de ma main droite. J’aime bien les montrer à Maman et Papa : je montre la paume de ma main gauche, et je les fais défiler avec l’index de ma main droite. Mes parents commentent mes photos : ils semblent souvent ravis. En parlant de photos, mon succès fou est revenu depuis qu’on voyage dans les îles touristiques des Cyclades : les mamies asiatiques m’ont retrouvé, et me bombardent de photos. FoniKonaï !

Et puis le soleil descend, on s’arrête, on est arrivé. En grignotant des biscuits au chocolat qu’il partage avec moi, Papa me montre sur la carte le chemin qu’on parcouru. « C’est loin Bouan ? » je demande. Il me montre. C’est loin. Et puis il n’y a pas de mer à côté de Bouan. « Il pleut à Bouan ? ». « Oui, pas mal en ce moment » me répond Maman. « Et combien on a fait de kilomètres aujourd’hui ? » je demande toujours. Parfois c’est quarante : « Ouaouh c’est beaucoup ! » je m’exclame. Parfois c’est cinquante : « Ouaouh c’est beaucoup ! » je m’exclame. Parfois c’est soixante : « Ouaouh c’est beaucoup ! » je m’exclame. Parfois c’est soixante-dix : pfff … Je sais compter jusqu’à 14 sans me tromper, jusqu’à 23 avec quelques oublis.

Du coup demain je vais à l’école. Vers 10 heures. Je sais déjà que je vais me réveiller trop tard, et que je n’aurai pas le temps de petit déjeuner. FoniKonaï !

5 Commentaires

  1. Quelle belle surprise ce matin en ouvrant ma boîte aux lettres : une dédicace de Nono accompagnée de celles de ses parents … merci à vous trois pour cette pensée grecque… et tant pis pour Tsipras !! Bons vents pour la suite de votre périple qui nous fait tant rêver !!
    Bisous de Martine

  2. Quelle chance tu as de voyager.profite en bien. 😜😉

  3. Nono ne sois pas trop pressé d’aller à l’école,évite la tant que tu le peux. Un conseil d’ami. 😉🏣=😪

  4. Tu vis de belles aventures Nono avec tous tes petits copains dans ta carriole et parmi des paysages magnifiques. Avec Rémi nous pen sons souvent à toi et Loélie me réclame souvent des photos de Nono On t embrasse bien fort et bonne route à tous.

  5. Quelle vie trépidante tu as Nono !!!
    T’occuper de ton frère et de ta sœur, des poussins, des petites voitures, de Gargamel et Azrael… de la distance des parcours quotidiens… En plus de faire les selfies avec les grands mères Asiates… Et gérer les lubies de tes parents !!!
    Pas étonnant que tu ne puisses pas trouver le temps de t’inscrire à l’école !
    Pour pallier à ce manque, on voit quand même que tu as une imagination débordante !!!
    Gros bisous à toi.

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